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[focus] Silent Running, Douglas Trumbull, 1972



La nature a disparu. Plus de verdure sur la Terre. La flore, mais aussi la faune sont vouées à l’extinction. Bienvenu dans le futur ! C’est sûr qu’il y a des accroches plus attirantes, surtout concernant un film de Science-Fiction. On attend des batailles, des aliens belliqueux, de la technologie fun et cool, un héros campbellien… On en est loin, car l’œuvre de Donald Trumbull propose totalement l’inverse. Dans un décors minimaliste, il propose un pamphlet écolo. Nous sommes en 1972, c’est l’ante-Woodstock, The Lord of The Ring et dans les poches de toute une génération, le Flower Power a encore un sens. Oui, Silent Running est un film de Hippie !




Alors que la planète Terre traverse visiblement une mauvaise passe (on l’apprend par la biais d’un bilan fait par Lowell, le personnage principal), plusieurs vaisseaux (une dizaine) ont été envoyés dans l’espace avec à leur bords des forêts. Suite au besoin de réutiliser les vaisseaux à des fins commerciales, l’ordre est donné de détruire les dômes abritant ces derniers espaces de verdure d’un monde en déclin. Lowell s’y oppose, mais il est seul. Les bases du récit sont posées et elles sont claires. Le scénario oppose l’industrialisation galopante des années 60 et l’impact durable sur la nature.



Ce qui choque c’est que ce film qui a aujourd’hui 44 ans est d’une actualité impressionnante. Son message résonne encore à l’heure où la foret vierge de Bornéo est en train de disparaître au profit de l’huile de palme… En petit film de S-F qui paye pas de mine, avec ses douces inspirations asimoviennes, Silent Running interroge. Comme bien souvent dans les bons récits de S-F, ce n’est pas dans le futur qu’il faut voir l’histoire de cet homme qui se bat pour conserver une foret à laquelle il a consacré 8 ans de sa vie, mais c’est bien dans l’actualité qu’il faut regarder. Celle de 1972, celle de 2016, c’est du pareil au même.



Douglas Trumbull réalise ici son premier film, il est avant tout spécialiste des effets spéciaux, on lui doit notamment ceux de 2001, l'Odyssée de l'Espace (Stanley Kubrick, 1968) ou encore ceux de Rencontres du troisième type (Steven Spielberg, 1977) et Blade Runner (Ridley Scott, 1982). Dans l’équipe du film, on retrouve de jeunes talents comme Michael Cimino (au scénario) ou encore John Dykstra (encore étudiant, il réalisera cinq ans plus tard les effets spéciaux d’un certain Star Wars (George Lucas, 1977). Mais le film vaut aussi beaucoup pour la performance de l’immense Bruce Dern (vu récemment dans Nebraska (Alexander Payne, 2013) ou The Hateful Eight (Quentin Tarantino, 2015). Figure du Nouvel Hollywood, il porte littéralement cette œuvre à bout de bras.


Témoin d’un cinéma très typé années 70 (il était même sortie en double feature à l’époque), Silent Running incarne ce Cinéma libertaire cher aux cinéastes du Nouvel Hollywood. Par la simplicité de son histoire, de sa narration et de ses enjeux, il questionne plus qu’il n’apporte de question. Ce n’est pas une leçon écolo à deux balles qui nous est passé pendant 1h25, mais simplement un divertissement intelligent. Ses effets spéciaux d’une grandes qualités (encore aujourd’hui) et les petits robots (très humanisés) qui tiennent compagnie à Lowell annoncent vraiment Star Wars et la tournure plus mainstream que prendront les films de science-fiction des années 80. Mais la parenté la plus proche (paradoxalement avec le film le plus éloigné) est avec Interstellar (Christopher Nolan, 2014), qui reprend une grande partie de son intrigue, de ses enjeux et de sa narration. Cela montre au moins que le film n’a pas été oublié par tout le monde. Et pour ceux à qui Interstellar fût parlant, la prochaine étape sera peut être de se tourner vers cette petite pièce de collection minimaliste perdue au fin fond des seventies.



 


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